Depuis quelques années les recherches en sciences de gestion s’intéressent à l’influence de la religion sur les comportements en matière de management . Pour ce qui nous concerne nous nous intéressons à l’impact de la religion sur le comportement de consommation pour deux raisons. La première est que le consommateur musulman n’est pas un consommateur comme tout autre car guidé par son éthique islamique. La seconde est l’émergence du concept « halal » comme critère de segmentation du marché musulman avec des consommateurs homogènes dans leurs comportements de consommation. Le marché des produits « halal » est une nouvelle tendance de consommation en fonction du profil du consommateur et de sa relation à la pratique de la religion.
1. Religion musulmane et vie des affaires au Sénégal
5Le concept de religion est traditionnellement défini selon deux approches. La première approche est anthropologique, elle met l’accent sur l’idée de communauté morale et sociale (D.E. Durkheim, 2005). La deuxième approche est cognitive et psychologique évolutionniste, elle considère la religion comme à la fois :
- une affaire d’hommes et notamment de dispositions psychiques de ceux qui en deviennent les spécialistes,
- une variante de la culture, non plus comme un système de symboles mais comme une réponse adaptative « une sorte d’adaptation culturelle, plutôt spéciale » (W. La Barre, 1970).
- une histoire longue de type évolutif.
7L’Islam signifie « soumission à Dieu », il désigne la religion dans la prédication du prophète Mohamet, car, selon le verset coranique III, 17, « la religion aux yeux de Dieu, est l’Islam ». L’Islam est une religion monothéiste qui a trait aux relations de l’homme avec Dieu et aux relations entre les hommes, dans le cadre de la vie en société (G. Causse, 2009). Le fondement de l’Islam est le Coran ou livre saint et parole de Dieu révélée par le prophète Mohamet au début du VIIe siècle, alors que la Sunna ou hadith traduit les enseignements et vie du prophète. Les hommes soumis à l’Islam sont des musulmans, donc les mots, musulman et Islam, ont le même sens.
1.1. Islam et ses principes
8Les textes ou versets du Coran reposent sur des principes ou codes de comportement. Les principes sont au nombre de cinq :
- le principe de lieutenance ou de gérance des biens qui stipule que la propriété absolue n’existe pas. « Aucune propriété n’est le bien exclusif de son possesseur. Le véritable propriétaire est Dieu qui la laisse à l’homme son vice-gérant ou lieutenant sur terre qui doit la faire fructifier » (L. Siagh, 2001). Cette notion de non propriétaire exclusif de l’homme conduit à une forme sociétale de la propriété qui est de nature à éviter certains abus comme : la concentration et/ou l’accumulation du capital, le gaspillage de la richesse, la thésaurisation (G. Causse, 2009)
- l’éthique du travail en Islam repose sur des vertus contraires à l’enrichissement illégal par une exploitation injuste du travail des autres. Le travail est valorisé dans le Coran, car l’homme doté de ses capacités physiques et intellectuelles a pour mission sur terre de faire fructifier les ressources naturelles mises à sa disposition par Dieu. Le travail est donc considéré, au point de vue économique, comme un facteur de production important qui mérite la rémunération qui en résulte. Le travail est un acte aussi pieux que la prière alors que l’oisiveté et la paresse sont condamnées. Il devient donc une obligation et une responsabilité pour les hommes. Toute personne valide ne doit pas se livrer facilement à la mendicité même si l’Islam encourage l’acte de charité. L’Islam rejette l’exploitation de l’homme par l’homme, car tout travail jugé injuste est condamné. Le travail est reconnu, du point de vue économique, comme un facteur de production qui mérite une rémunération alors que le capital représente le résultat d’un travail.
- la neutralité du temps laisse incertain l’avenir. Cette incertitude ne peut être contrôlée par l’homme. L’Islam considère que le temps est une création de Dieu et il lui appartient. L’incertitude liée à la maîtrise du temps amène le musulman à se remettre à la volonté divine en prononçant à chaque fois les mots « Incha-Allah » (si Dieu le veut). En conséquence, le temps ne peut faire l’objet d’aucune transaction commerciale. Toute opération ou rémunération basée sur le temps est illicite, d’où l’interdiction de l’intérêt basé sur le temps.
- le rôle de l’argent est complexe dans la religion musulmane. Contrairement aux théories économiques, dans la religion musulmane, l’argent n’est considéré comme un capital qu’après transformation par le travail. L’argent n’a aucune utilité intrinsèque, il n’est qu’un moyen d’échange de biens non fongibles. Dans la religion musulmane l’argent n’a pas de valeur en soi. C’est seulement un outil de mesure, d’échange et de réserve de valeur. Aucune activité n’est légitime s’il permet à l’argent de créer de l’argent sans l’association du capital physique.
- la coexistence pacifique est de rigueur dans le monde musulman où la vie en communauté prédomine. La société est basée sur le groupe et les règles qui les régissent influencent les comportements des membres. La famille, l’ethnie et les groupes religieux impactent sur les décisions et comportements d’achat des membres. Une société islamisée basée sur un système communautaire fonctionne grâce à la solidarité du groupe.
10Ces principes ci-dessus conduisent à deux types de règles qui régissent l’Islam : les règles relatives à la « dévotion » et les règles relatives à la vie des affaires ou de la société. Concernant, les règles relatives à la « dévotion », elles mettent en évidence la relation entre l’homme et Dieu. Ces règles reposent sur les cinq piliers de l’Islam. Le premier est la croyance en Dieu qui est unique, n’a ni d’égal, ni associé, il n’a pas été engendré et n’a pas engendré comme l’affirme la sourate dite du « culte sincère », cette croyance est aussi accordée à son prophète Mohamet. Le deuxième est la pratique des cinq prières quotidiennes. Le troisième est le jeûne durant le mois de Ramadan. Le quatrième est de faire l’aumône, la charité aux pauvres en plus de l’obligation de payer des impôts sur son revenu ou ses richesses (la Zakat), pour une répartition plus équitable des ressources. Le dernier est le pèlerinage à la Mecque au moins une fois dans sa vie si la personne en a les moyens.
11S’agissant des règles relatives à la vie des affaires, elles définissent la relation entre les hommes pour rendre harmonieuse la vie en société. Elles reposent sur le principe que tout est permis dans la religion musulmane sauf certaines pratiques considérées comme illicites. Qu’est-ce qui n’est pas permis par la religion musulmane ?
1.2. Islam et relations d’affaires
12L’Islam repose sur des valeurs d’ordre éthique, spirituel, social qui permettent de rendre les relations d’affaires plus sociables et humaines. La vie des affaires selon la loi islamique est fondée sur des interdits qui font sa particularité d’avec les autres religions et la rapprochent de la religion juive. En effet, dans la religion juive certaines prescriptions sont identiques à celles de la religion musulmane (la non-consommation de la gélatine, de la viande d’un animal qui n’est pas égorgé vivant) dans la consommation alimentaire. Les règles alimentaires juives sont prescrites dans la Torah [2][2]Torah est la loi juive ou le Talmud [3][3]Talmud est l’activité rabbinique (Ph. Robert-Demontrond, 2009). Ce qui est interdit et banni par le Coran et la Sunna (pour les musulmans) ou la Tohra et le Talmud (pour les juifs) est dit non conforme aux pratiques religieuses. Dans la religion musulmane, les interdits sont considérés comme illicites ou « haram », alors que dans la religion juive ils sont considérés comme « impurs » ou « non kasher ». Ce qui est autorisé ou permis est « halal » pour la religion musulmane et « kasher » pour la religion juive. Si des ressemblances existent sur certains points, des différences subsistent. La loi cadrant la vie musulmane admet que dans la vie des affaires tout est permis sauf quatre principales pratiques relatives au comportement de l’agent économique en général et du consommateur en particulier. Ces pratiques sont : l’intérêt (le riba), la thésaurisation, la spéculation (maysir) et les activités et produits illicites.
- l’intérêt appelé « le riba » est tiré de l’étymologie Ar-ribâ qui veut dire surplus, usufruit. Il est traduit au sens de la loi islamique par usure et intérêt. Dans la Charia la pratique du riba constitue un péché d’une extrême gravité conduisant à la damnation (I. Chapellière, 2009). Deux types d’usure se présentent : l’usure de crédit et l’usure de vente. Le premier correspond à un taux d’intérêt excessif exigé par le prêteur. Le fait de donner un crédit à quelqu’un et qu’il vous rembourse plus tard la somme, plus un surplus, constitue un délit pour le prêteur.
14Le second est le surplus exigé lors de l’échange ou la vente d’un bien contre un autre de même nature. Ce surplus n’est pas calculé en fonction du temps, donc l’usure de la vente n’est pas souvent considérée comme un riba pour certains. L’Islam encourage le commerce et recommande un prêt d’honneur (sans intérêt) au lieu d’un prêt usuraire. Tout en intégrant des objectifs de rentabilité et d’efficacité l’agent économique se doit de respecter un ensemble de principes éthiques.
- la thésaurisation : dans le Coran il est interdit de thésauriser de l’argent ou de l’or alors que des personnes souffrent de famine et de misère. Il est certes vrai que le musulman ne doit pas gaspiller son argent, il doit le dépenser, jouir des fruits de son travail tout en évitant les abus. L’avarice est un acte condamné par la religion musulmane comme l’illustre cette sourate « À ceux qui thésaurisent or ou argent sans le dépenser dans la voie de Dieu, (…) savourez ce que vous avez thésaurisé ». Le verset recommande au musulman de jouir de sa fortune en payant la zakat et en donnant l’aumône. Les « biens » obtenus grâce à la production du travail et du capital doivent être « purifiés ». Donc, les personnes peuvent faire fructifier leur argent en visant un intérêt commun pour la société.
- la spéculation (le maysir) est le fait d’acheter un bien (or ou argent) à bon marché pour le revendre dans une période de pénurie. Cette pratique nuit à la société. Car la spéculation qui porte sur des paiements de différences, devient un jeu, un pari. Alors que toute forme de contrat dans lequel le droit des parties contractantes dépend d’un événement aléatoire est un acte impur selon le Coran.
- les activités et les produits illicites ne sont pas autorisés par la religion. Le musulman ne doit ni les pratiquer, ni les consommer.
16Ces activités et produits illicites sont :
17le commerce dans certains secteurs d’activité (l’alcool, la viande de porc, les armes, les jeux de hasard, la pornographie) et par extension leur consommation,
18les transactions portant sur des métaux (l’or, l’argent) afin d’éviter la spéculation,
19toutes formes de contrats pouvant favoriser des litiges entre des contractants (contrat avec condition suspensive, contrat double, contrats complexes, vagues, imprécis, incertains…) et pouvant entraîner un risque de perte (le gharar) pour l’un des contractants. C’est le cas aussi des ventes à caractère aléatoire ou possédant un élément vague dépendant d’autres événements relatifs à l’objet de la vente, au prix ou au délai de livraison… Une personne religieuse se comportera davantage selon les principes et valeurs de la religion à laquelle elle adhère (S. Mokhlis, 2006). Ainsi, la religiosité sera définie comme le degré de croyance d’une personne au sein de la société ou d’un groupe religieux.
1.3. Islam au Sénégal
20L’Islam est introduit au Sénégal au XIe siècle. Sa diffusion s’est faite lentement et progressivement. La grande expansion de la religion musulmane date de la seconde moitié du XIXe siècle avec l’avènement de la colonisation qui a détruit les systèmes monarchiques en place. La population se sentant menacée s’est tournée vers les marabouts cherchant leur protection. Les marabouts ont joué un rôle capital dans la propagation de l’Islam au Sénégal. Ils sont à l’origine des confréries, organisations des musulmans partageant une même façon de pratiquer l’Islam. Au Sénégal, l’Islam se pratique dans les confréries. La société sénégalaise reste fortement attachée aux exigences ancestrales, aux traditions et coutumes malgré la présence de l’État à la tête des institutions.
21Aujourd’hui le Sénégal est un pays dont la majorité de la population est de religion musulmane (90 %) [4][4]Direction et prévision statistiques du Sénégal, 2002 et les 10 % représentent les autres religions (christianisme, animisme, protestantisme). Le Sénégal est un pays qui fonctionne sous un régime laïque. Il est connu dans le monde par ses traditions religieuses basées sur le soufisme [5][5]Le soufisme repose sur trois éléments : la Charia (la Loi), la…. Si l’on parle de l’Islam au Sénégal, les premières choses qui viennent à l’esprit sont les confréries religieuses appelées également les « tarîqa ». La confrérie d’appartenance ou « tarîqa » est la voie par laquelle le musulman emprunte pour accomplir les règles relatives à la « dévotion ». Le choix d’une voie permet au musulman de suivre les conseils d’un guide religieux pour mieux se rapprocher du Seigneur (S.M. Angha, 1991).
22L’histoire du Sénégal est marquée au milieu du XIXe siècle par la présence de grands hommes religieux [6][6]Cheikh Omar Fouti Tall, El hadji Malick Sy, Cheikh Ahmadou…. Par leur intermédiaire, le pays a connu un développement des confréries religieuses, un aspect du soufisme. La vie et les propos des grands soufis [7][7]Le soufi est un saint personnage dont la vie était consacrée à… ont été traduits oralement ou transmis dans des recueils par leurs disciples [8][8]La confrérie ou tarîqa est basée sur des doctrines puisées de…. Ce qui a permis à l’Islam d’être la religion la plus pratiquée au Sénégal. Dans ce pays, la majorité des musulmans se rattache encore, de près ou de loin, à un guide religieux (un marabout) et tous les marabouts sont liés, à des degrés divers, à une confrérie religieuse. Par extension donc, la plupart des musulmans sont en relation avec une confrérie, qui peut aller d’une simple sympathie à une affiliation.
23L’apparition des confréries religieuses remonte à l’histoire du soufisme, la voie mystique de l’Islam. Elles sont nombreuses [9][9]Les confréries au Sénégal sont : les khadres, tidjanes,… au Sénégal, mais les quatre principales sont :
24la confrérie xaadir (Qadiriyya) la plus ancienne installée en Afrique de l’Ouest, les origines remontent à Bagdad au XIIe siècle, elle est fondée par le mystique soufi Abd al Qadir al Jilani,
25la confrérie tidjane (Tijaniyya) qui est la plus répandue (50 % des musulmans), fondée à Fès au Maroc par le marabout Sidi Ahmed Tidjani (né en Algérie),
26la confrérie mouride (Mouridiyya) la plus active (30 % des musulmans), fondée par le marabout Cheikh Ahmadou Bamba (né à Mbacké au Sénégal puis exilé au Gabon),
27la confrérie des Layènes qui est une communauté musulmane située à Yoff, au nord de Dakar, fondée par le guide Seydina Limamou Laye.
28À l’heure actuelle, la popularité de ces quatre principales confréries dépasse les frontières du Sénégal. Connu pour ses villes saintes (Touba, Tivaouane, Yoff) où chaque année des milliers de personnes s’y rendent pour un pèlerinage, le Sénégal est un pays religieux.
29L’Islam basé sur la confrérie sera relié aux comportements de consommation et aux valeurs du Marketing au Sénégal.
1.4. Islam et valeurs du marketing
30Après avoir clarifié les valeurs islamiques dans la société de manière générale et dans la vie des affaires en particulier, nous avons mis en perspective ces valeurs dans un contexte culturel particulier. Maintenant nous allons présenter une vision de l’Islam dans un contexte marchand au travers des valeurs du marketing. Quelles sont les valeurs du marketing ?
31En marketing la valeur est associée au produit et à l’entreprise. L’acquisition d’un avantage compétitif pour une entreprise suppose la création d’une valeur supérieure aux clients (Ph. Aurier, Y. Evrard, G. N’Goala, 2001). Cette valeur peut provenir de l’estimation morale que le consommateur en fait. Elle peut être conceptualisée comme étant le lien entre le consommateur et les avantages perçus à travers la relation coût/avantages (J.-J. Lambin, 1989). En effet, les consommateurs recherchent essentiellement des services ajoutés étant générateurs de satisfaction et qui conduisent à discriminer les comportements et à différencier l’offre.
32Les valeurs marketing fondamentales résulteraient des avantages monétaires (profits) que l’entreprise peut obtenir dans l’échange et des responsabilités sociales, du respect de l’équité et de transparence dans les différentes transactions. Cette recherche de profit repose sur des pratiques du marketing relatives aux caractéristiques perçues du produit ou service, au prix, à la distribution et à la communication (B. Pras et C. Vaudour-Lagrâce, 2007). Quelle est la relation entre l’Islam et les valeurs du marketing ? La valeur du point de vue du consommateur traduit l’espérance à l’égard du produit ou service. L’utilité attendue par le consommateur repose sur la formation d’un imaginaire de produits ou services sain (t) s (Ph. Robert-Demontrond, 2009). L’activation de l’imaginaire des consommateurs repose sur deux expressions. La première est la saillance de « Dieu », le consommateur associe la consommation d’un produit licite, kasher, à celui relevant du saint et du sacré, religieusement autorisé à la consommation. La seconde est la saillance de l’homme qui active les représentations sociales basées sur des degrés d’exigence variables. Ces différences peuvent être significatives quand à la fréquence des contrôles, leur ampleur et leur rigueur (Ph. Robert-Demontrond, 2008).
33Tous les consommateurs soucieux de produits sain (t) s accordent un intérêt puissant à la traçabilité du produit (Ph. Robert-Démontrond, 2009). Selon lui cette traçabilité du produit peut se mesurer au moins sur deux plans. Sur le plan cognitif, les consommateurs veulent connaître la traçabilité du produit car les informations imparfaites et asymétriques sur les marchés créent une incertitude dans leur esprit quant à la qualité des produits offerts. Les consommateurs n’identifient véritablement les produits que difficilement. Il existe donc une forte incertitude sur les qualités organoleptique, hygiénique et nutritionnelle. Sur le plan affectif, les consommateurs s’intéressent à l’origine du produit pour réduire l’incertitude spirituelle. Le rapport contemporain au corps a varié, sur les dernières décennies, dans le sens d’une proscription du risque (la pensée de la mort et ce qui pourrait se passer après la mort). Le produit ou service licite a une forte charge symbolique et émotionnelle permettant au consommateur de renforcer ses convictions religieuses.
34Dans une approche empirique, nous allons relier les valeurs islamiques aux valeurs du marketing à travers les pratiques commerciales et l’utilité espérée du consommateur musulman sénégalais.
2. Méthodologie
35Cette recherche revêt deux aspects qui lui donnent un caractère exploratoire. Le premier est que le sujet n’est pas encore étudié en Afrique et plus précisément dans le domaine du comportement du consommateur, donc l’étude se limite à comprendre le « pourquoi » des comportements et le rôle de la confrérie dans la consommation. Le second est que l’échantillon retenu n’est pas suffisamment représentatif de l’ensemble de la population musulmane dakaroise, donc l’influence de chaque groupe religieux sur la consommation ne peut être décrite. La recherche est purement descriptive car elle se limite à présenter l’impact des valeurs islamiques, à travers les groupes confrériques, sur la consommation des produits et services interdits par l’Islam dans un pays à majorité musulmane. Elle se contente ainsi d’analyser les relations entre les valeurs islamiques et les valeurs du marketing. Cette recherche, même si elle ne prétend pas à la représentativité absolue n’en est pas moins exemplaire et n’en exhibe pas moins des traits symptomatiques. Elle est le descripteur, l’indicateur de situations vécues ; parce que dans les interactions qui se produisent autour de ce mode de consommation, on observe le jeu de logiques sociales et de consommation plus vastes, la mise en œuvre de normes plus répandues, le déploiement de stratégies plus globales, le poids de contraintes exogènes. Cette recherche a donc un caractère exemplaire qui, sans une connaissance, risque d’être une pratique généralisée.
2.1. Cadre de l’étude
36Notre population cible est constituée de musulmans sénégalais consommateurs ou non de produits « haram [10][10]Un produit « haram » est un produit illicite, non autorisé, non… » et appartenant à une confrérie religieuse sénégalaise [11][11]Il existe plusieurs confréries religieuses au Sénégal dont les…. Nous sommes partie du constat qu’au Sénégal, malgré la présence d’une forte communauté musulmane, la vente de viande de porc et autres types de viande « haram » n’est pas prohibée. Nous sommes donc dans un contexte où le gouvernement n’interdit pas les pratiques du jeu de hasard car cette activité est génératrice de revenus. De même au Sénégal la population est libre de traiter avec les banques classiques ou dites conventionnelles.
37Trois catégories de produits ont été choisies pour avoir une vision générale de la problématique. D’abord, les produits de grande consommation dont la traçabilité est difficilement identifiée en Afrique. Dans cette première catégorie de produits, nous nous intéressons aux volailles, un produit de la pâtisserie (les gâteaux) et un produit cosmétique (pommade pour les cheveux). Ce choix est justifié par le fait que le Sénégal, pays en voie de développement, dispose de structures de distribution traditionnelles et anciennes qui rendent parfois difficiles la connaissance de l’origine des produits ou des éléments qui entrent dans leur composition. Ce manque d’information n’est-il pas à la fois un obstacle aux pratiques du marketing et de la religion pour une communauté musulmane soucieuse de l’éthique islamique ? Ensuite, la seconde catégorie concerne les services bancaires. L’Islam interdit les prêts avec intérêt (riba) alors que les premières banques installées au Sénégal [12][12]Avant l’indépendance du Sénégal, 1960 sont des banques classiques ou conventionnelles qui représentent environ 99 % [13][13]À l’heure actuelle, il n’existe au Sénégal qu’une seule Banque… des structures de financement. Le riba interdit par la religion musulmane est de pratique courante au Sénégal. Enfin, la dernière catégorie de produits choisie représente les produits dérivés (les jeux de hasard). Cette activité a connu une forte évolution au Sénégal et pourtant elle fait partie des pratiques interdites par l’Islam (maysir). Cet engouement vers ces pratiques contraires à la religion est-il lié à des facteurs culturels ou autres ?
38L’échantillon de convenance retenu est de 250 musulmans de toutes confréries confondues. Dans cet échantillon nous avons des utilisateurs effectifs et des non utilisateurs absolus. Pour maximiser le taux des réponses et obtenir une grande fiabilité des résultats, nous avons utilisé des entretiens directs. Les données sont analysées à l’aide de statistiques descriptives.
2.2. Méthode de collecte et de mesure
39Nous avons utilisé un questionnaire composé de quatre catégories de questions. La première catégorie est relative aux valeurs culturelles et religieuses de l’individu avec une échelle de religiosité axée sur les valeurs islamiques. La deuxième met l’accent sur les activités de consommation de produits ou services illicites de l’individu. La troisième porte sur les valeurs économiques et sociales qui font référence aux pratiques du marketing dans un environnement musulman. Enfin, la dernière catégorie est relative aux questions d’identification qui mettent en évidence les caractéristiques de l’individu et la confrérie d’appartenance. Toutes les questions sont des questions fermées sauf celles relatives à l’identification de l’interviewé. Les questions fermées portent sur les comportements et attitudes du consommateur musulman. Elles sont, pour la plupart, présentées sous forme d’échelle de mesure à 5 points.
40Pour vérifier les qualités de l’instrument de mesure de la religiosité, nous avons testé sa fiabilité et sa validité. L’alpha de Cronbach est utilisé pour mesurer la fiabilité de l’ensemble des 5 items [14][14]Les 5 items sont : « le choix d’un produit prend en compte les… censés contribuer à la mesure de l’échelle de religiosité. La valeur de ? doit être proche de 1 pour que l’échelle de religiosité ait une bonne cohérence interne. Alors que la validité convergente met en évidence les corrélations entre les items de l’échelle de religiosité.
2.3. Description de l’échantillon
41La majorité des répondants exerce un travail indépendant ou libéral (56 %), les travailleurs rémunérés ne représentent que (23 %), le reste est constitué de personnes inactives (21 %). Selon les données collectées, les femmes représentent (55 %) de l’échantillon et les hommes (45 %). L’échantillon est décomposé en trois tranches d’âge : une première comprise entre 25-45 ans (57 %), une deuxième entre 46-65 ans (34 %) et une troisième constituée de personnes âgées de plus de 65 ans (7 %). La majorité des répondants appartient à la confrérie tidjane (50 %), elle est suivie des mourides (31 %), puis des Khadres (11 %), des Layènes (7 %) et enfin des autres groupes comme les ibadourahmanes (1 %).
2.4. Fiabilité et validité de l’échelle de mesure
42L’étude de fiabilité réalisée sur l’échelle de religiosité donne un résultat satisfaisant avec un alpha de Cronbach égal à 0,8468 et tend vers 1, donc, les items expliquent bien le phénomène. L’analyse de fiabilité montre une bonne corrélation entre les items avec une moyenne de 0,5251 par item.
Tableau 1
Résultat analyse factorielle exploratoire de la religiosité

Tableau 2
Corrélation entre items

43L’analyse factorielle exploratoire de l’échelle de religiosité montre une bonne qualité de représentation des items. L’échelle de mesure de la religiosité présente une variance qui explique 62,28 % de l’importance que la population étudiée accorde aux valeurs religieuses. Les valeurs islamiques font référence aux valeurs de base de F.R. Kluckhohn et F.L. Strodtbeck (1961) qui ont retenu dans leurs travaux cinq [15][15]Les cinq dimensions universelles de F.R. Kluckhohn et… dimensions culturelles. Ces dimensions recouvrent également celles de G. Hofstede (1987) qui en retient quatre [16][16]Les quatre dimensions culturelles de G. Hofstede (1987) sont :….
3. Les résultats de l’étude
44Cette présente étude met en évidence le lien entre le groupe confrérique et les comportements de consommation, d’une part, et la relation entre les valeurs islamiques et les valeurs de marketing, d’autre part. La matrice de corrélation ou la corrélation de Spearman nous permet de mesurer le sens de la relation entre les variables.
3.1. L’influence du groupe confrérique sur les comportements de consommation
45Dans un premier temps, nous avons relié le groupe confrérique aux différentes variables de l’échelle de religiosité. Les résultats montrent qu’il existe une forte corrélation entre le groupe confrérique et la religiosité. La corrélation entre le groupe confrérique et chacun des items est très significative avec un coefficient (r = 0,763) et un seuil de signification ? qui tend vers 0. Il existe donc, une influence du groupe confrérique sur le degré de croyances religieuses des musulmans sénégalais. Et par conséquent, nous pouvons nous baser sur le groupe confrérique pour apprécier les valeurs islamiques.
46Dans un second temps, nous avons essayé d’associer le groupe confrérique aux différents comportements de consommation. De manière générale, il existe une relation significative entre le groupe confrérique et la satisfaction des besoins économiques du consommateur musulman. Mais une approche analytique nous permet de relever certaines spécificités comme le montrent les tableaux suivants :
Tableau 3
Corrélation entre construits

47La corrélation entre le « groupe confrérique » et la « consommation de volailles » n’est pas significative (r = 0,090 < 0,3), le seuil de signification ? est égal à 0,441. La consommation de volailles chez le musulman sénégalais n’est pas influencée par son appartenance à un groupe confrérique. Ce comportement montre une relative exigence du consommateur musulman sénégalais sur la provenance de la viande de volailles. Par contre, la corrélation entre « groupe confrérique » et « consommation de gâteaux » est très significative (r = 0,392 > 0,30), le seuil de signification ? tend vers 0. L’influence du groupe confrérique est forte quant à la consommation de gâteaux faits à base de vins et de liqueurs. Lorsque le consommateur musulman est au courant de la présence d’éléments illicites dans les gâteaux, il ne les consomme pas, comme il est recommandé dans la religion musulmane. L’analyse de corrélation entre « groupe confrérique » et « utilisation de pommade pour cheveux » n’est pas significative à (r = 0,151 < 0,30). D’après nos résultats, le groupe confrérique n’impacte pas sur l’usage de produits cosmétiques avec des composants interdits par la religion comme la graisse de porc. Ce comportement peut s’expliquer soit par l’ignorance des textes du Coran, soit par le manque d’informations sur le produit, soit par le type d’achat individuel :
- par ignorance : dans notre échantillon le niveau de connaissance coranique est faible, 13,6 % n’ont pas fait d’études coraniques, 55,6 % ont un niveau faible. Malgré un fort taux de musulmans au Sénégal, la pratique reste modérée. Les musulmans diffèrent selon leur degré de croyance ou de religiosité. Dans notre étude nous distinguons quatre catégories de musulmans. La première catégorie appelée Mouslim ou musulman symbolise la personne qui croit en Dieu et en son prophète, elle est soumise à la doctrine du Coran et de la Sounna. La deuxième est le Moumine ou le croyant, ce dernier croit en Dieu et pratique les préceptes de l’Islam sans grande exigence (avec légèreté et souplesse). La troisième est le Mouhliss, une personne qui croit en Dieu, aux préceptes de l’Islam et les pratique avec sainteté, pureté et rigueur. La dernière catégorie est le Mouhsine, c’est l’étape suprême de croyance. Le Mouhsine a une forte conviction des fondements de la religion, une soumission complète aux préceptes et une très bonne connaissance et maîtrise du Coran et de la Sounna.
- par manque d’informations sur le produit : dans notre échantillon la majorité des utilisateurs de produits cosmétiques sont des femmes et ces dernières, particulièrement, constituent la couche de la population en Afrique la moins instruite ou ayant un niveau d’instruction faible (32 % n’ont aucun niveau ; 38 % ont un niveau bas). Souvent, les femmes ne peuvent pas lire les notices (écrites en français ou anglais) pour identifier les composants existant dans les produits cosmétiques et non autorisés par la religion musulmane. En effet le niveau d’instruction a un impact sur l’identification des produits, leurs composants et leur origine. Dans notre échantillon, certaines femmes ignorent même qu’il pouvait exister des composants non autorisés par l’Islam dans certains produits cosmétiques.
- type d’achat et consommation individuelle : l’achat de pommade pour cheveux est un achat individuel dont le processus est souvent l’apanage d’une seule personne. Du moment que l’achat n’est pas effectué dans le cadre d’un groupe, l’individu ressent moins les pesanteurs sociales. Ce type d’achat est moins contrôlé par le groupe confrérique.
Tableau 4
Corrélation entre les construits

49Les résultats montrent une relation significative entre le « groupe confrérique » et « jeux de hasard » (r = 0,297), le seuil de signification ? est égal à 0,006. Bien que certains musulmans sénégalais soient conscients que le jeu de hasard est une des pratiques interdites par la religion musulmane, ils s’y adonnent en cachette de peur d’être stigmatisés par la société ou le groupe d’appartenance. Ce comportement peut s’expliquer par le fait que les gens vivent en dessous du seuil de pauvreté et ont besoin d’accroître leurs revenus pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille (22,4 %). Les conditions économiques difficiles, taux de pauvreté élevé et important pourcentage de population inactive (21 %), favorisent ces activités. Si d’aucuns jouent aux jeux de hasard pour accroître leur gain, d’autres s’adonnent à cette activité par dépendance ou addiction.
50La corrélation entre « groupe confrérique » et « services bancaires classiques » n’est pas significative à (r = 0,186 < 0,30). Ce comportement peut s’expliquer par le fait que les banques classiques sont les plus nombreuses dans l’environnement financier et que le musulman sénégalais n’a pas d’autre alternative que de s’adresser à elles pour réaliser ses transactions commerciales, activités très courantes au Sénégal. Contrairement aux résultats de M.M. El Nahas (2007), nos travaux montrent que la religion n’a aucune influence sur le choix d’un service bancaire au Sénégal à cause de la manière dont l’Islam est appréhendé (moins radical, plus tolérant sur certains aspects), mais aussi du fait du nombre très réduit de banques islamiques au Sénégal [17][17]71 % des personnes interrogées ne connaissent ni leur existence….
Tableau 5
Corrélation entre les construits

51D’après nos résultats, trois principales raisons justifient le comportement du consommateur musulman sénégalais à l’égard de produits illicites ou « haram ». La première raison est qu’il consomme, par ignorance des textes du Coran ou par manque d’informations complètes et précises sur les produits ou services. La deuxième est qu’il consomme, parce que victime de la pauvreté, de ressources limitées avec un besoin de se nourrir pour vivre. Le consommateur sénégalais accorde plus d’importance à la quantité qu’aux informations sur le produit. La troisième raison est qu’il consomme, parce qu’il n’existe pas souvent dans son environnement commercial d’autres possibilités de choix de produits.
3.2. L’influence des valeurs islamiques sur les pratiques du marketing
52Les résultats montrent qu’il n’existe aucune relation entre les valeurs islamiques et les différentes pratiques du marketing au Sénégal. Contrairement aux études de B. Pras et C. Vaudour Lagrâce, (2007), il n’existe pas encore au Sénégal une convergence effective des valeurs islamiques vers les valeurs du marketing. Cette incohérence est relevée au niveau de certains éléments du mix marketing.
53Au niveau du produit ou service, (37 %) des consommateurs musulmans sénégalais interrogés affirment que les produits illicites sont nuisibles pour la communauté musulmane sur le plan mental. Et pourtant, 48,4 % de notre échantillon consomment ces produits illicites. Ces derniers interdits par la Charia, leur consommation compromet le caractère sain (t) et pur de la pratique de la religion musulmane. Ces affirmations sont soutenues par B. Pras et C. Vaudour-Lagrâce (2007), qui soulignent que « le produit ne doit pas être nuisible (sur le plan mental ou physique) à l’individu et à la communauté. Il doit être pur et propre à la consommation ».
54L’étude ne montre aucune relation entre l’emballage du produit et les valeurs religieuses. Les emballages ne donnent pas toutes les informations sur le produit ce qui est contraire aux valeurs religieuses. Le consommateur n’est pas souvent informé des caractéristiques intrinsèques du produit. L’incertitude augmente avec l’absence d’informations sur les « ingrédients » qui entrent dans la composition du produit.
55Au niveau de la publicité, nos résultats ne soulignent aucune relation entre la publicité et les valeurs islamiques. Les valeurs véhiculées par la publicité sont contraires aux valeurs islamiques, les consommateurs musulmans sénégalais affirment être victimes de techniques consistant à surévaluer le produit ou de fausses impressions sur le produit ou service. En somme, ils sont couramment victimes d’une publicité mensongère ou trompeuse.
Conclusion et limites
56L’objectif de cette présente étude est de mettre en évidence la relation entre les valeurs islamiques et les valeurs marketing en donnant les raisons qui poussent les consommateurs musulmans sénégalais à consommer des produits non conformes à l’éthique islamique. Les raisons qui sont d’ordre technique, économique et social ne sont pas sans effet sur le comportement du consommateur. Malgré une convergence constatée entre valeur islamique et valeur marketing dans certains pays musulmans, la relation reste très faible et presque inexistante au Sénégal. Le consommateur musulman cherche à manger « halal » parce que c’est, tout d’abord, un acte de profession de foi, un acte d’affirmation de soi et d’affiliation, ensuite, un acte de différenciation (F. Bergeaud-Blackler, 2006). L’environnement doit favoriser ce principe identitaire, de reconnaissance sociale qui reflète un engagement islamique.
57Cette recherche a un double impact sur les pratiques managériales des entreprises. Tout d’abord elle souligne qu’il serait une erreur pour les managers de considérer le concept « halal » comme le seul critère de segmentation du marché musulman, la culture locale est déterminante dans les pratiques de l’islam. L’étude soutient, néanmoins, que l’asymétrie d’information chez le consommateur musulman sénégalais est forte, ce qui augmente l’incertitude sur la qualité perçue. Pour remédier à cela, une procédure de certification ou un label « halal » doit être mis en place avec une norme unique pour toute la communauté musulmane. Ce label « halal » correspondra à un signal de marché réduisant l’incertitude des consommateurs quant aux caractéristiques des produits (Ph. Robert-Demontrond, 2009). Le label sera un moyen pour le consommateur de connaître la traçabilité des produits alimentaires face aux problèmes de santé et de crises alimentaires actuels. Les mentions portées sur les emballages doivent engager la responsabilité morale des fabricants.
58Ensuite, ce travail de recherche permettra aux entreprises de relier la consommation à la particularité de la religion musulmane pour mieux développer des actions de positionnement de certains types de produits ou marques.
59L’apport de notre travail est la présentation de valeurs marketing comme une association de valeurs de consommation à travers l’utilité espérée par le consommateur et de valeurs commerciales de l’entreprise à travers le profit réalisé. Ce travail de recherche présente cependant quelques limites que nous ne manquerons pas de souligner. D’abord, sur le plan conceptuel, l’islam confrérique n’existe qu’au Sénégal. Les prescriptions révélées, le Coran, il y a plusieurs années demeurent toujours d’actualité et conservent toutes leurs valeurs éthiques, spirituelles, sociales et sociétales même si certaines particularités sont révélées dans leurs applications. L’étude de l’influence de la religion musulmane sur le comportement de consommation au Sénégal est un exemple qui ne peut être généralisé.
60Ensuite, sur le plan méthodologique, l’étude est descriptive, elle ne compare pas les comportements des consommateurs de produits « halal » et de produits « non halal ». Une étude comparative mettrait plus en évidence les comportements de consommation des musulmans. Une analyse factorielle confirmatoire permettrait de renforcer la validation de l’échelle de religiosité qui est une variable déterminante de la pratique islamique au Sénégal et dans l’explication des comportements de consommation. Cette recherche n’explique pas, ne compare pas les comportements de consommation entre les groupes confrériques, donc les comportements constatés ne peuvent être attribués à une confrérie donnée.
61Cet article met en perspective certaines pistes ou voies de recherche. Dans une recherche future il serait intéressant d’effectuer la recherche sur un échantillon représentatif des musulmans sénégalais appartenant aux différentes confréries religieuses existantes avec une marge d’erreur faible afin de donner à cette recherche un caractère généralisable.
62Les résultats de l’étude auraient été plus significatifs si nous nous étions intéressés à un seul produit ou service. C’est pour cette raison que des travaux futurs sont envisagés sur le comportement des clients envers les banques islamiques au Sénégal.
Notes
- [1]L’Islam encourage la consommation qui permet à l’homme de vivre avec dignité selon la sourate : « Ô vous, les hommes mangez des nourritures licites et bonnes provenant de la terre… » (sourate II, verset 168-9). Les choses bonnes ou licites (permises) à la consommation sont tout ce qui n’est pas nocif à la santé mentale et spirituelle de l’individu »
- [2]Torah est la loi juive
- [3]Talmud est l’activité rabbinique
- [4]Direction et prévision statistiques du Sénégal, 2002
- [5]Le soufisme repose sur trois éléments : la Charia (la Loi), la Tarîqa (la Voie) et la Haqiqa (la Vérité).
- [6]Cheikh Omar Fouti Tall, El hadji Malick Sy, Cheikh Ahmadou Mbacké, Seydina Limamou Laye
- [7]Le soufi est un saint personnage dont la vie était consacrée à une grande méditation, la compréhension des textes sacrés coraniques et par un désintéressement des choses matérielles afin de se consacrer à l’adoration divine pour une quête de Dieu
- [8]La confrérie ou tarîqa est basée sur des doctrines puisées de l’Islam ; elle est définie comme des voies de salut de l’âme. Elle constitue une école de pensée musulmane avec à leur tête un guide religieux, le marabout, qui est assisté de conseillers.
- [9]Les confréries au Sénégal sont : les khadres, tidjanes, mourides, layènes, niassènes, ibadourahmanes
- [10]Un produit « haram » est un produit illicite, non autorisé, non halal ou non permis par la religion musulmane
- [11]Il existe plusieurs confréries religieuses au Sénégal dont les principales sont : le tidjanisme, le mouridisme, le khadria, etc.
- [12]Avant l’indépendance du Sénégal, 1960
- [13]À l’heure actuelle, il n’existe au Sénégal qu’une seule Banque Islamique : la Banque Islamique du Sénégal (BIS)
- [14]Les 5 items sont : « le choix d’un produit prend en compte les valeurs sociales et comportementales de la religion » ; « le degré de croyance influence le comportement d’achat et de consommation » ; « le groupe confrérique influence le comportement de consommation » ; « la religiosité au sein de la confrérie a une influence sur le comportement d’achat et de consommation » ; « la religiosité au sein de la famille a une influence sur le comportement d’achat et de consommation »
- [15]Les cinq dimensions universelles de F.R. Kluckhohn et F.L. Strodtbeck (1961) sont : le rapport avec les autres, la nature humaine, le rapport au monde, l’orientation temporelle, les activités.
- [16]Les quatre dimensions culturelles de G. Hofstede (1987) sont : la distance hiérarchique, l’individualisme/le collectivisme, le contrôle de l’incertitude et la masculinité/féminité
- [17]71 % des personnes interrogées ne connaissent ni leur existence ni leur mode de fonctionnement
Mis en ligne sur Cairn.info le 25/09/2012